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Le poignard est encore humide du coup dans le dos

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mars 05, 2025
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Le poignard est encore humide du coup dans le dos
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Par Orion des Marais

Rarement dans l’histoire récente un peuple a dû assumer la sécurité d’un continent entier. C’est le cas de l’Ukraine pour l’Europe face au géant russe. Depuis trois ans, après un début de guerre miraculeux pour ce petit pays, il a versé le prix du sang, de la sueur et des larmes. Mais cela grâce au soutien américain qui se dérobe dorénavant sous ses pieds.

Trump veut sans doute opérer un renversement d’alliance. Il est absurde au regard de la profondeur des liens entre la Chine et la Russie : certains à Washington ont évoqué une prise à revers de la Chine comme Kissinger l’avait fait dans les années 70. Et il est sidérant pour ses anciens alliés européens et son crédit à travers le monde, en particulier vis-à-vis de Taïwan.

La guerre d’Ukraine déclenchée par Poutine, au regard de ses objectifs en 2022, était pourtant un lamentable et cruel échec.

« Merdre ! » – A. Jarry

Il voulait, pour reprendre ses mots, « dénazifier » l’Ukraine, en fait opérer un changement de régime dans ce qu’il considérait être son pré-carré : Zelensky n’a pas été renversé. Son offensive tous azimuts de 2022 n’a permis ni de s’emparer du port en eaux profondes d’Odessa, ni de faire tomber Kiev, ni de s’emparer du Donbass.

Il voulait démilitariser l’Ukraine : son armée est aujourd’hui l’une des plus puissantes, si ce n’est la plus puissante, de l’Europe démocratique libérale.

Il voulait aussi éloigner et affaiblir l’OTAN, cela n’a pas été le cas. En tous cas à minuit moins cinq de l’arrivée de Trump au pouvoir.

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« Je suis le maître du monde, et je veux tout ! » – A. Jarry

Car aujourd’hui, Trump est au pouvoir, dans le pays à la plus puissante armée du monde. Et il veut se désengager de l’OTAN, ne garantissant plus la sécurité de l’Europe. Ce qui est une trahison au regard des engagements antérieurs des États-Unis. Depuis un mois, Poutine a bénéficié d’un spectaculaire retournement de situation. L’Occident se trouve, lui, profondément divisé. Le retournement des États-Unis est d’autant plus rageant que la guerre n’était donc pas du tout gagnée par Poutine : que ce soit sur le front, ou à l’arrière au niveau économique.

  • Les Européens vont-ils participer aux négociations de paix ? Moscou « préférerait ne pas ».

  • Allons-nous, Européens, envoyer des troupes en Ukraine pour garantir la paix ? Moscou « préférerait ne pas ».

  • Le soutien financier américain va-t-il continuer ? Moscou « préférerait ne pas ».

La question du remboursement de l’aide américaine à l’Ukraine a aussi donné lieu à de nombreux commentaires parmi les idéalistes européens. Là encore Moscou préférerait qu’un courtier en dette, bien poisseux de préférence, face du forcing à la porte de la maison Ukraine pour un remboursement immédiat.

« L'argent est le nerf de la guerre, et je veux tout l'argent du monde ! » – A. Jarry

Un soutien étranger en temps de guerre se paie. Mais le créancier peut être plus ou moins réaliste. Comme les États-Unis après leur intervention en 1917 qui avaient fini par renoncer à une partie de leurs créances à l’égard de la France. Par contre, ils n’avaient pas pensé un instant mettre la main sur des actifs de leur allié, comme Trump veut le faire aujourd’hui en s’emparant des terres rares ukrainiennes, et non russes.

Il n’est pas seulement question ici de ce que les juristes appellent la fongibilité des biens (in fine, payer une dette en argent ou en marchandise, c’est toujours rembourser), puisque la Russie aurait pu être tenue de payer des réparations de guerre après l’avoir déclenchée. Mais le droit n’importe pas beaucoup à Trump, et la responsabilité de Poutine ne sera pas engagée. Et c’est là que le renversement est aussi terrible pour l’Europe : dans le monde de Trump, seuls les forts comptent, c’est-à-dire les grands pays, de préférence dirigés par des autocrates.

Mais tout cela ne serait rien encore si les Américains n’avaient pas déclaré la cessation immédiate de leur soutien, acculant les Ukrainiens à demander la paix. Situation diplomatique désespérée pour eux, qui n’a rien à voir avec la situation sur le terrain autrement plus favorable. Le shérif tire dans le dos. Visera-t-il juste ? Les ukrainiens peuvent-ils tenir un peu sans l’aide des usines d’armement américaines ?

« Je vais tous les tromper pour arriver à mes fins ! » – A. Jarry

Dans les médias, en Europe, et dans le monde libre réduit à l’Europe et au Canada, le brouillard de l’information de la « submersion cognitive » a chaque jour plus sidéré par les positions du nouvel homme fort de Washington, à en perdre la raison. C'est sans doute voulu pour désorienter l’opinion publique de ses concurrents internationaux et conforter la sienne, dans un monde cybernétique où les cerveaux sont connectés à longueur de journée aux écrans. Mais le verso de cette stratégie globale adaptée à un homme fort, Trump, est qu’il est lui-même un homme désorienté. Que veut-il ? La paix conclue plus vite qu’un 100 mètres est couru. Mais pourquoi cette précipitation ? Pour tenir une promesse électorale, certes, mais les mid-terms sont encore loin.

« Je n'ai pas d'amis, seulement des complices ! » – A. Jarry

Le vote récent à l’Assemblée Générale des Nations unies a été vécu comme une hallucination supplémentaire. Les États-Unis, pris une énième fois par leur hubris, ont voté avec la Corée du Nord et la Russie contre la reconnaissance de l'intégrité territoriale de l’Ukraine.

« Je suis un génie, et personne ne peut me résister ! » – A. Jarry

Et les négociations n’ont pas encore commencé ! Nous pouvons nous hasarder à tirer des enseignements de l’histoire, en tous cas du précédent mandat de Trump. En Afghanistan, il avait tout lâché aux Talibans, aboutissant à la débâcle qu’avait dû assumer Biden. Et avec la Corée du Nord, lorsqu’il s’est aperçu que leurs négociateurs étaient durs, il s’était purement et simplement « découragé ».

L’Europe avec le Canada doivent donc se réarmer urgemment pour faire face au réarmement entamé il y a bien plus de dix ans par Poutine. Maintenant que nous sommes seuls, en aurons-nous la volonté ? L’Allemagne est contrainte par sa politique monétaire stricte, et la France par le poids de ses dépenses sociales. Un financement de ce réarmement à l’échelle européenne peut être une solution. Mais quid de la dépendance aux usines d’armement américaines ?

Tous les yeux se dirigent vers les petits pays baltes. La Hongrie, glorieuse résistante à la mondialisation, est déjà accordée à Poutine comme une poulie à son mécanisme. Tout comme la Slovaquie. Et comme cela a failli aussi être le cas en Roumanie, avant qu’un candidat, gonflé aux vidéos Tik Tok comme d’autres aux stéroïdes, soit arrêté dans sa « résistible ascension » par la Cour constitutionnelle.

Il ne s’agit pas de se battre à tout prix contre les Russes, mais de les dissuader de nous attaquer, nous Européens, maintenant que nous sommes comme une île de la côte depuis laquelle on peut voir l’ennemi. D’être unis et suffisamment armés.

Les populistes européens, à l’image de Marine Le Pen lors de sa dernière campagne présidentielle, voulaient un concert des nations plutôt qu’un monde unipolaire. Il semble que leurs souhaits soient exaucés, mais de manière très grossière : pas d’équilibre des forces, et pas de valeurs partagées comme c’était le cas lors du pacifique XIXe siècle en Europe. Seul un axe autoritaire Moscou-Washington et au milieu, l'Europe. Vont-ils s’y prendre les pieds ou nous mettre au menu ? Les « officiers de salon » français collaborant avec la Russie doivent sabrer du champagne français.

« Je vais semer la terreur dans vos cœurs ! » – A. Jarry

La peur avec laquelle ils jouent se retourne contre eux : le choc est tel pour les opinions publiques occidentales qu’elles font pour l’instant bloc derrière leurs leaders. Ils ont beau agiter la question du partage de l’arme nucléaire française pour sidérer leur électorat, l’urgence est ressentie aujourd’hui par tous. Et face au vieil argument de Marine Le Pen (qui commentait la guerre d’Ukraine en direct depuis le Salon de l’agriculture) selon lequel elle ne savait pas ce qu’était un Européen, il faut croire que d’autres savent tenir une carte.

« Vous allez tous regretter de m'avoir défié ! » – A. Jarry

Zelensky a fait les frais de la sidération cognitive lors de son déplacement à Washington, en direct lui aussi, mais du bureau ovale, et sur toutes les télévisions du monde.

Nous n’aurons pas le mauvais goût d’évoquer les questions de financement du RN, leurs militants les plus zélés ne croyant pas à ces fariboles, comme ceux de Sarkozy pendant longtemps n’ont pas voulu croire à un financement libyen. Et puis la justice donne raison au méchant, méchant Mediapart.

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